Analyse des résultats du 1er tour

Abstention :

En 2014, à Lorient, le taux d’abstention aux élections municipales était supérieur au taux national : 46% à Lorient contre 36% dans la France entière, soit 10% de plus.

En 2020, l’abstention a fortement augmenté partout suite à la menace du Coronavirus. En France elle a atteint 55%. A Lorient elle a été de 66%, soit 11% de plus que le taux national.

En 2014 on pouvait expliquer ce différentiel de 10% d’abstention, par le fait que pour beaucoup de Lorientais, l’élection était jouée d’avance par la réélection hautement probable de Norbert Métairie.

Avec 8 candidats, soit 4 de plus et l’absence du maire sortant parmi les candidats, cette explication semble insuffisante.

Cela signifierait-il qu’une part plus importante des électeurs lorientais se détournerait des urnes par la conviction de l’inutilité de leur vote ?

Pour essayer de vérifier cette hypothèse, regardons les résultats de Lanester, ville voisine à la répartition de catégories de population proche et où la maire sortante, Thérèse Thierry ne se représentait pas non plus.

   Tx abstention 2014 2020   Variation
   France 36,5 55,4 19,0
Lorient 46,2 66,2 20,0
   Diff Lorient/France 9,8 10,8 1,1
   Lanester 44,3 61,0 16,7  
   Diff Lorient/Lanester 1,9 5,2 3,3

Entre 2014 et 2020, on constate que l’abstention à Lanester a moins augmenté qu’à Lorient. Le différentiel de taux d’abstention entre les deux villes s’est considérablement accru en 6 ans, passant de 1,9 à 5,2.

Ainsi, alors que Lorient se caractérisait déjà par une abstention déjà plus forte en 2014, en 2020 l’écart s’est encore creusé à 5,2 points.
Autrement dit, on a encore moins voté à Lorient qu’à Lanester alors que les circonstances étaient très proches : un risque identique face au coronavirus, un maire sortant ne se représentant pas.

En 2014 comme en 2020, 5 listes étaient en lice à Lanester.

En 2014,  4 listes se présentaient à Lorient contre 8 en 2020.

A moins de considérer que plus il y a de listes, moins les électeurs se déplacent, ce qui serait hasardeux, il faut donc chercher ailleurs.

Le vote des électeurs FN en est peut-être une explication : à Lanester il n’y avait pas de liste FN/RN (rassemblement National) en 2014, mais une en 2020. Ces électeurs se seraient-ils plus mobilisés à Lanester puisque cette liste leur apportait un choix qu’ils n’avaient pas jusque là ?

Une analyse liste par liste peut apporter d’autres explications.

Certes beaucoup d’abstention  ne permet pas une comparaison significative en nombre de voix.
Par contre en considérant que l’abstention produite par une cause non politique, a touché tous les candidats dans à peu près les mêmes proportions, une analyse en pourcentage a un sens.

La liste Damien Girard : Union de la gauche et écologistes. 23%

L’échec des partis

Cette liste se présentait comme la liste des gauches unies avec 7 constituants : le PS, le PC, EELV, L’UDB et Lorient en transition, soutenue par Place publique et Nouvelle Donne.

Avec 23% seulement la liste Girard fait un piètre résultat.

Au vu de la mine déconfite de leurs membres dans le hall de l’hôtel de ville, le soir des résultats, on peut comprendre leur dépit d’une part, car ils ont une faible avance sur leurs concurrents et d’autre part car ils n’ont aucune réserve au second tour.

Pourquoi peut-on affirmer que c’est un échec ?

Aux Européennes, où le taux d’abstention était du même ordre qu’aux municipales de 2014, les partis de gauche et écologistes qui soutenaient Damien Girard aux municipales, représentaient 30,91 %

  Partis de la Liste
  PS/Place publique 1653 8,82%
  PC 532 2,84%
  EELV 3193 17,04%
  Écologistes (D Bourg) 415 2,21%
5793 30,91%
  D Girard Municipales 2897 22,99%
  Différence -2896 -7,92%

Le potentiel d’électeurs ayant l’année précédente (2019) voté pour les partis regroupés dans la liste de Damien Girard représentaient près de 31% (30,91%). C’est le potentiel minimum qui aurait dû être atteint.

Or la liste n’a réalisé que 23% (22,99%) soit une baisse de 8% (7,92%).

Pire !

Par des procédés discutables, Damien Girard et ses associés ont réussi à éliminer des élections municipales deux partis de gauche : France Insoumise et Générations.S (Benoit Hamon), qui faisaient de l’ombre au PC et au PS.

Ces partis étaient associés dans la liste « Lorient se lève » et ont eu à leur tête la communiste Delphine Alexandre. Le PC et l’UDB ayant rejoint Damien Girard ont vidé de leur substance cette liste, qui n’a pu se présenter.

Or à Lorient ces deux listes ont représenté près de 12% (11,57%) des électeurs aux européennes.

  Autres partis de gauche  
   France Insoumise 1165 6,22%
   Génération.S 1003 5,35%
2168 11,57%

Aussi le potentiel des voix de gauche qui auraient pu voter pour la liste de « l’union de la gauche et des écologistes » est de 42,48%. Damien Girard n’a fait que 22,99% soit près de 20% (19,49%) de moins !

Partis de la liste D Girard 5793 30,91%
Autres partis de gauche 2168 11,57%
Total Européennes 7961 42,48%
D Girard Municipales 2897 22,99%
Perte en un an -5064 -19,49%

On comprend mieux la mine déconfite des responsables de la liste de Damien Girard.

Cette désaffection est-elle liée à la tête de liste, au principe qu’une somme de partis politiques n’est jamais égale à l’addition de leurs électeurs ?

Des électeurs écologistes ont peut-être rejeté l’alliance avec le parti communiste.

Ces derniers n’ont peut être pas apprécié d’être mêlés avec les autonomistes bretons de l’UDB.

Le choix de la section du PC de s’unir avec les écologistes de Damien Girard a été voté à une voix.

Des électeurs communistes ont-ils boudé les urnes ?

Dans les 10 bureaux qui ont donné le plus de voix à la gauche contestataire aux Européennes, Damien Girard n’y a réalisé que 22,5%, soit moins que son résultat moyen sur l’ensemble de Lorient (23%)

Cette très faible attractivité de la prétendue liste « d’union de la gauche » explique peut-être l’abstention plus forte à Lorient qu’ailleurs.

En tout cas plutôt que d’accuser les autres de diviser la gauche, ils devraient s’interroger sur leur propre incapacité à fédérer la gauche.

Liste de Fabrice Loher (Union pour les Lorientais) soutenue par LR, l’UDI, le Modem.

Une liste qui ne décolle pas, mais qui résiste.

Fabrice Loher qui se présentait pour la 4ème fois sait que son étiage est égal au tiers des électeurs soit entre 31 et 33%.

Aux municipales 2014 il avait atteint, sans concurrent à droite, 31,64% avec 6190 voix.

Aux Européennes la somme des voix de LR et des macronistes, qu’on peut désormais classer à droite, sans aucun doute, était de 31,84%  avec 5968 voix.

Aux municipales 2020 il, réalise 20,82%  avec 2624 voix auxquelles on peut ajouter les voix du LR dissident David Drégoire qui représentent  3,44%, soit 434 voix

La mouvance Droite et Centre que représente Fabrice Loher a disposé donc lors de ce premier tour de 3058 voix soit 24,20% des exprimés.

Loher Municipales 2014 6190 31,64%
Fillon Présidentielles 4863 16,98%
LR+UDI Législatives 3131 17,00%
LR+UDI Européennes 1539 8,21%
Loher + Dregoire 3058 24,20%
perte en 6 ans   -7,44%

Si on considère que les élections présidentielles, législatives, européennes sont biaisées par la présence du courant macroniste, on peut estimer que Fabrice Loher réussit, aux municipales, à limiter les pertes dues à la présence d’un candidat macroniste (Laurent Tonnerre).

Par rapport à son potentiel, on peut estimer que seul 7,5% (7,44%) de son électorat a rejoint le candidat En Marche.

Cette résistance est-elle due à son équation personnelle, à une campagne pendant laquelle il a su avec sérénité développer des propositions travaillées ou au manque de réussite de son concurrent macroniste, c’est difficile à estimer.

La liste Bruno Blanchard (sortants, Lorient 2030)

L’usure du pouvoir sanctionnée.

Avec 2 325 voix et 18,50% des voix, la liste soutenue officiellement par le maire sortant Norbert Métairie et sur laquelle il figurait, s’effondre en perdant la moitié de son poids électoral.

En 2014 Norbert Métairie regroupait 8 248 voix pour 42,16%.

En 2020 Bruno Blanchard perd 23,66% et ne prend que la 3ème place.

Un autre candidat se réclamait du bilan des sortants, Laurent Tonnerre.
Les deux adjoints sortants ne réalisent que 36,30 % soit un recul de 5,86% par rapport au résultat de Norbert Métairie en 2014.

En taux d’adhésion on tombe à 42%(41,93), ce qui est très faible. Autrement dit à taux d’abstention égal près de 60% (58,07%) des électeurs de 2014 ne se reconnaissent plus dans cette mouvance.

Problème de la tête de liste, désavoué en pleine campagne par le PS qui refuse de l’adouber ?

Trop d’élus sortants donnant l’impression, assumée d’ailleurs, que tout continuera comme avant ?

Absence d’idées ou de propositions nouvelles ?

On ne voit pas trop comment cette liste pourrait rebondir et progresser.

La liste Laurent Tonnerre, Demain Lorient

La claque !

Avec 2 243 voix et 17,8% cette liste se place en 4ème position.

Laurent Tonnerre était de tous les candidats celui qui s’affirmait vainqueur avec une assurance qui laissait le moins de place au doute.

Le retour à la réalité doit être terrible.

Son résultat traduit la baisse continuelle de l’influence des macronistes à Lorient.

Présidentielles 8406 29,35%
Européennes 4429 23,63%
Municipales 2020 2243 17,80%
perte/présidentielle -6163 -11,55%
perte/européenne -2186 -5,83%

L’argument avancé après les résultats est d’avoir été « plombé par En Marche ».
Mais c’est Laurent Tonnerre lui-même qui s’est battu contre Bruno Paris pour obtenir à Paris l’investiture « En Marche » et c’est lui qui a affiché la photo de Jean-Yves Le Drian, accompagné d’un texte manuscrit, sur sa profession de foi.

A force de se tortiller entre le soutien macroniste, l’appui socialiste (Mad in Lorient) et le soutien au bilan de Norbert Métairie qu’il assumait totalement, il a trop cru que son équation personnelle lui suffirait pour gagner.
Quant à son aura dans les quartiers, qu’il aurait conquise grâce à ses postes précédents d’adjoint à la vie associative et aux quartiers, elle paraît bien pâle au vu de ses résultats à Kervénanec où il ne réalise pas plus que son score global (17,86% à Kervé contre 17,80%) et aussi à Bois du château où il est très en retrait avec 14,98% contre 17,8%

Jean-Yves le Drian, la déchéance.

On aurait pu lui souhaiter de mieux finir que d’accompagner cette 4ème place et les 17,8% à Lorient réalisés par son protégé Laurent Tonnerre, passé comme lui du PS à LREM. 

Ancien maire de Lorient, certains le présentaient encore comme le tireur de ficelles et affirmaient que ne rien pouvait se faire à Lorient sans son aval.
Déjà bafoué par Gaël le Saout qui a refusé de se soumettre à son insistance pour prendre la tête d’une liste alors « qu’elle lui devait tout », en affichant ostensiblement son appui à Laurent Tonnerre il tombe avec lui.

Jean-Yves Le Drian ne représente plus rien à Lorient et s’il aura marqué l’histoire passée de la ville, il n’est ni  son présent, ni son futur.

Son mouvement « les progressistes » a-t-il encore un avenir ? On peut en douter.

Front National avec Christian Mouton : 7% !

Des électeurs en retrait ?

Au vu des résultats, on pourrait se réjouir de l’effondrement du FN à Lorient.

A Lanester pour la première fois une liste de la même mouvance s’est présentée aux municipales et a recueilli 14,6% des voix.

La personnalité de Christian Mouton a-t-elle joué en défaveur du FN, qui d’habitude est peu corrélée avec la personnalité des candidats locaux ?

Des électeurs FN se sont-ils abstenus plus que d’habitude ?

Des électeurs ayant voté pour le FN par volonté de manifester leur sentiment d’abandon auraient-ils voté pour Energies Citoyennes, qui ont été les seuls à proposer une véritable action sociale et solidaire par des mesures concrètes ?

Municipales 2014 2892 14,8%
Présidentielles 4305 15,0%
Législatives 1803 9,8%
Européennes 4035 21,5%
Municipales 2020 886 7,0%
perte/municipales 2014 -2006 -7,8%
perte/présidentielle -3419 -22,8%
perte/européenne -3149 -29,3%

Énergies Citoyennes avec Jean-Philippe Olivieri

La liste surprise

Avec 830 voix et 6,6%, ce résultat peut s’avérer dans l’absolu décevant au vu de la qualité du programme et de l’énergie déployée.
Mais ce résultat peut aussi être considéré comme une belle réussite.

Les informations glanées ici et là auprès d’électeurs indiqueraient que nous serions les plus pénalisés par l’abstention liée au coronavirus. Ainsi, même des membres de la liste ne se sont par rendus aux urnes pour cela ! Pour les autres listes il y avait l’enjeu d’arriver en tête avec en conséquence une mobilisation plus militante. Notre électorat moins politisé et encadré ne s’est donc pas autant mobilisé. Ce qui a d’autant réduit proportionnellement notre résultat notamment en pourcentage.

Un candidat inconnu en début de campagne.
Une liste composée d’inconnue.s dont la majorité des membres l’a rejoint début 2020 et n’a donc été opérationnelle que les deux derniers mois et même parfois moins.

Pas de relais de partis (c’était un choix assumé) ou de réseaux constitués au fil des années pour les autres candidats.

Par ailleurs Hassan Dibesse, sans programme, qui se présentait aussi comme une liste citoyenne, a peut-être brouillé le choix des électeurs. Sans en avoir la certitude, ses 262 voix et 2,9% nous auraient presque permis d’arriver à 10%.

Comme disait Talleyrand « Quand je m’observe, je m’inquiète. Quand je me compare, je me rassure »

En deux mois de campagne (elle a vraiment commencé pour nous le 15 janvier) Energies Citoyennes Lorient a obtenu

Plus du tiers de la liste de Fabrice Loher, conseiller municipal sortant qui se présentait pour la 4ème fois

Plus du tiers de la liste de Bruno Blanchard, adjoint sortant qui a 12 ans de mandat

Plus du tiers de la liste de Laurent Tonnerre, adjoint depuis 18 ans

      % d’ECL
Damien Girard  2897 23,0% 28,7%
Fabrice Loher 2424 20,8% 34,2%
Bruno Blanchard 2325 18,5% 35,7%
Laurent Tonnerre 2243 17,8% 37,0%
ECL 830 6,6% 100,0%

Ce tableau se lit ainsi par ligne : le résultat d’ECL représente 28,7% du résultat de Damien Girard (= 830/2897)…

Quant à la liste de Damien Girard, elle réalise 23% en additionnant le poids de 5 composantes soit une moyenne de 4,6% par parti, deux points de moins que nous.

Aux Européennes où le taux d’abstention était dans la norme, le PC a obtenu 532 voix, l’UDB au législatives 2017 a réalisé 435 voix. Nous avec 830 voix et une abstention record on réalise plus que ces partis à la longue histoire.

Aux Européennes en 2019 le PS a obtenu à Lorient 1653 voix, soit le double de ce que nous obtenons avec une abstention record.
A abstention égale nos 830 voix correspondraient à 1234 voix.

On ne doit pas se valoriser outre mesure de ces comparaisons mais ramener à la raison tous ces dirigeants de partis qui nous prennent de haut avec mépris et arrogance alors qu’ils sont pour certains incapables de réunir plus d’électeurs que nous, ou à peine plus.

De tous les bureaux, celui où nous réalisons le meilleur résultat est le bureau N° 20 à Kervénanec ou habite David Cherfa, avec 10,7% des voix.

Il y habite depuis 1 an et a réussi à se faire connaître suffisamment pour emporter une adhésion significative.

Si nous avions eu assez de temps dans d’autres quartiers, nous aurions pu obtenir d’aussi bons résultats au vu de l’implantation et la notoriété de nombre de nos colistier.e.s.

Conclusions :

Cette élection du 15 mars était annoncée comme celle des surprises. Ce fut le cas.

Pas de grand gagnant largement en tête et un éclatement des voix sur de nombreuses listes.

On peut noter

une vraie volonté de renouvellement par un très faible résultat des deux listes se réclamant du bilan du maire sortant : 36,30% (avec l’appoint de votes macronistes venant de droite).

Si on estime à 7% environ le nombre de votes de droite s’étant détournées du vote Loher pour rejoindre Laurent Tonnerre, ce la réduirait à 30% la part du vote en faveur des sortants.

– Une marginalisation du vote Macron malgré l’espoir de Laurent Tonnerre qui en avait l’investiture de ramener vers lui plus d’électeurs, anciens socialistes comme lui.

L’échec des assemblages partisans. Le rejet des partis est patent au vu du faible résultat de Damien Girard (23 %) qui pensait regrouper toute la gauches unie et les écologistes qu’on annonçait grand vainqueur de ces élections. On peut d’ailleurs noter que la vague verte que l’on a pu constater dans certaines villes ne s’est pas manifestée à Lorient.

– Une abstention plus forte à gauche et à l’extrême droite qu’à droite.

Le taux élevé d’abstention à Lorient pourrait s’expliquer par un refus de beaucoup d’électeurs de gauche de se reconnaître dans cette assemblage hétéroclite constituée autour du PS, qui à lui tout seul représentait le tiers de la liste de Damien Girard contre les 2/3 à partager entre 4 autres composantes.

Le résultat étonnamment faible du Front National (Rassemblement National) peut s’expliquer par une plus forte abstention de cet électorat pas suffisamment mobilisé par le geste citoyen électoral dans une période de crise sanitaire.

L’entrée en lice d’un mouvement inconnu jusque là, Énergies Citoyennes, qui réussit à représenter près de 30% de ce que font les autres listes présentes depuis des dizaines d’années à Lorient.

Notre électorat n’est pas militant et dans des situations difficiles comme celles que nous connaissons n’est pas mû par une volonté farouche de voter.
Des retours de proches qui ne sont pas rendus aux urnes indiquent que nos résultats ont été affectés par cette forte abstention. Notre résultat est donc sous-évalué…et prometteur !

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